Le harcèlement moral répond à une qualification bien spécifique, définie en fonction publique à l’article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, qui dispose :

« Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l’appréciation de la valeur professionnelle, la discipline, la promotion, l’affectation et la mutation ne peut être prise à l’égard d’un fonctionnaire en prenant en considération :

1° Le fait qu’il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ;

2° Le fait qu’il ait exercé un recours auprès d’un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ;

3° Ou bien le fait qu’il ait témoigné de tels agissements ou qu’il les ait relatés.

Est passible d’une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus ».

Les juges administratifs ont précisé, au cas par cas, les éléments qui caractérisent ou non une situation de harcèlement moral.

Il ressort de la jurisprudence rendue en la matière que les tensions entre des personnes au sein d’un même service ne matérialisent pas, à elle seules, une situation de harcèlement (Cour administrative d’appel de Douai, 26 avril 2005, n°02DA00284).

Toutefois, le placement du fonctionnaire en congé de maladie, en raison de son syndrome anxiodépressif, est susceptible de faire présumer l’existence d’agissements constitutifs de harcèlement moral à son encontre (en ce sens : Cour administrative d’appel de Bordeaux, 2 décembre 2019, n°17BX02602).

Pour qualifier une situation de harcèlement moral, les juges s’attachent à vérifier si les conditions de travail du fonctionnaire ont été dégradées par l’existence d’agissements répétés.

Par exemple, le fait de laisser un agent isolé, pendant plusieurs jours, sans lui donner aucune tâche à accomplir, caractérise une situation de harcèlement moral (Cour administrative de Marseille, 22 février 2015, n°03MA1229).

De la même façon, un fonctionnaire confiné dans des missions ne relevant pas de son grade, n’apparaissant pas dans l’annuaire de la structure, et ne disposant d’aucune téléphone fixe ou  portable, est victime de harcèlement moral. Dans cette affaire, l’employeur public a été condamné à verser à l’agent victime une somme de 15.000 euros en réparation de son préjudice (Cour administrative d’appel de Marseille, 21 mai 2019, n° 17MA02092).

Devant les juges, l’existence d’une situation de harcèlement moral implique une démarche active de la part de l’agent victime. Ce dernier doit leur soumettre des éléments de faits concrets et susceptibles de faire présumer l’existence d’un harcèlement.

En défense, l’administration dont relève l’agent devra démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement.

Les juges fondent leur conviction au vu de ces échanges contradictoires.

Le basculement d’une situation de mal-être au travail, ou « burn-out », à un cas de harcèlement moral s’identifie par des éléments précis et concrets. Une bonne connaissance de la jurisprudence rendue en la matière est donc indispensable.

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